Sardaigne et Méditerranée

David Herbert Lawrence

Lecture d’Elisabeth Gavalda avec Vincent Granger (clarinettes, clavier, guitare)


 

« Un beau jour, il vous vient une irrésistible envie de bouger — et, qui plus est, de bouger dans une certaine direction. Donc nécessité à la fois de sen aller et de savoir où. Mais où aller ? Il y a Girgenti, au sud. Tunis est proche. Girgenti avec son âme sulfureuse et ses temples grecs vigilants ? pour perdre tout à fait la tête ? Jamais. Syracuse non plus, avec ses grandes carrières de démence. Tunis ? l’Afrique ? Non, non, pas encore. Les Arabes ? Non plus. Naples, Rome, Florence ? Aucun intérêt. Quoi donc ? L’Espagne ou la Sardaigne ? La Sardaigne qui ne ressemble à rien. La Sardaigne sans histoire, ni date, ni race…

Et bien, soit, la Sardaigne. On dit que les Romains ni les Phéniciens, les Grecs ni les Arabes, ne purent soumettre la Sardaigne. Elle est à part : en dehors du circuit de la civilisation. Comme les terres basques. Bien sûr, aujourd’hui elle est italienne avec ses voies ferrées et ses autobus. Mais il existe toujours une Sardaigne indomptée. Elle se trouve dans le filet de cette civilisation européenne, mais jusquà présent, elle n’est pas prise. Et puis le filet, déjà vieux, se désagrège. Nombre de poissons glissent entre les mailles de la vieille civilisation européenne. Comme la grande baleine russe. Et probablement la Sardaigne. La Sardaigne donc ! Va pour la Sardaigne ! » D. H. Lawrence.

Lawrence est un observateur prodigieux des êtres et des paysages. En une phrase il sait deviner la dimension secrète de chaque chose. Il ressent l’âme primitive, à l’écart des mouvements de civilisation. Dans ce périple, rien ne lui échappe, en particulier la vérité profonde des êtres, l’antagonisme des sexes, les forces les plus profondes dissimulées au cœur des vivants. Tout est prétexte à une description bien sentie : les arbres, les fleurs, les fruits, la mer, les montagnes. Chaque parcelle du monde est saisie dans son intime vibration.